Thursday, December 01, 2005

Au sujet des langues étrangères – 2nde Partie.

« Plusieurs de mes coreligionnaires lisent des vers et des comptes de fées des Arabes, étudient les travaux des philosophes et théologiens Mohammedians, non dans le but de les réfuter mais pour apprendre à s’exprimer proprement, plus correctement et élégamment dans la langue arabe. Qui parmi eux a étudié l’Evangile, les Prophètes et les Apôtres ? Hélas ! Tous les talentueux jeunes chrétiens connaissent seulement la langue et la littérature des Arabes, lisent et étudient de manière assidue les livres arabes… Si quelqu’un parle des livres chrétiens, ils répondent d’un air méprisant qu’il ne mérite aucune attention ou quoi que ce soit. Quel dommage ! Les chrétiens ont oublié leur propre langue, et il est difficile de trouver une personne parmi mille qui peut écrire à un ami une lettre d’amitié décente en Latin. Mais il y a un nombre incalculable de personnes qui s’expriment très élégamment en Arabe, et rédigent des poèmes dans cette langue avec plus de beauté et plus d’art que ne le font les Arabes eux-mêmes. »

Le texte ci-dessus n’est pas un fantasme. Il a bien été rédigé au 9ème siècle en Espagne par l’évêque de Cordoba, Alvaro (la traduction (rapide) de l’anglais est mienne. J’ai trouvé cette citation dans un livre ou l’auteur réfère lui-même à ce bouquin : « History of the Byzantine Empire » par A. A. Vasiliev) .

Remplacez les mots Chrétien/Latin par Musulman/Arabe, et le texte deviendra d’une actualité étonnante. Ces propos seraient, alors, tenus à longueur de journée par nos coreligionnaires ou concitoyens. Le cri de l’évêque Alvaro nous permet également d’analyser notre situation avec plus de recul et de nous rendre à l’évidence, à savoir que le déclin d’une société a une incidence directe sur le déclin de sa langue (de ses langues). Les raisons de la marginalisation et du déclin, je les résume, à chaud et rapidement dans les trois points suivants :

1. L’abandon ou la négligence de la langue maternelle par nécessité. Par exemple, dans le domaine des sciences et de la technologie, à l’heure actuelle, on utilise le français ou l’anglais par ce que rien n’a été fait (ou presque) pour rendre l’Arabe adéquate dans ce domaine (non traduction des livres étrangers, etc.).

2. Le sentiment d’infériorité vis à vis de la langue étrangère qui fait que certains préfèrent s’exprimer en langue étrangère pour se sentir supérieurs ou accéder à des privilèges. Cela n’est pas toujours vrai comme une discussion chez Lilli l’a récemment bien montré, mais la tendance générale correspond bien à cette motivation.
3. Les efforts des pays puissants ou anciens colonisateurs de faire perpétuer la dépendance des anciens pays colonisés vis à vis de leur « maître ». Les retombées de ces efforts sont nombreuses : dépendance économique, disponibilité de la main d’œuvre bon marché en cas de nécessité, disponibilité de la matière grise à bon marche aussi, en cas de besoin, etc.

Petite digression : il est intéressant de noter que TV5, le principal véhicule de propagande (pas dans le sens péjoratif) de la francophonie, malgré toutes les déclarations de « bonne volonté » exprimée dans la charte de cette dernière, essaie toujours, de faire perpétuer la dominance du nord vis à vis du sud. Les programmes de la chaîne restent dominés par les pays du Nord: France, Belgique, Suisse et Canada, qui proposent des journaux d’information, des films, des documentaires et magazines quotidiens alors que les pays du sud se voient dédier, sporadiquement, des émissions exotiques ou des journées « spéciales »…

Tuesday, November 15, 2005

Au sujet des langues étrangères – 1ère Partie.

Parler des langues étrangères, personne ne peut le nier, est bénéfique et salutaire. Les avantages sont multiples : ouverture sur le monde, richesse culturelle, etc. C’est nécessaire aussi pour suivre le rythme infernal du développement technologique. Cela est d’autant plus vrai quand on sait qu’un pays comme la Grèce traduit plus de livres que tout le monde arabe réuni ! Les planifications et les discours sur l’arabisation sont une farce, pas plus. L’arabisation ne peut reussir que si elle est introduite progressivement dans le cadre d’un développement de l’enseignement beaucoup plus ambitieux, et non l’inverse.

Le paradoxe est que je reste convaincu qu’une condition nécessaire de l’essor d’un pays comme le Maroc est l’état de l’arabisation (Amazighisation) de son enseignement et des ses institutions. Condition non suffisante certes, mais nécessaire. En d’autres termes, les Marocains quand ils auront contribué à l’essor de leur pays, en utilisant les avancées techniques dans des langues telles que l’Anglais ou le Français, auront à cœur –fierté identitaire oblige entre autres– de se pencher sur leur langue maternelle, pour accompagner ce développement. Du reste, il est difficile de trouver un pays développé (parfois même émergent) où une langue étrangère est préférée à la langue nationale.

La seconde partie traitera des facteurs influant sur la marginalisation d’une langue nationale.

P.S. Rédiger ce texte dans une langue étrangère n’est nullement ironique, mais reflète seulement l’état des lieux…

Tuesday, October 18, 2005

Un Marocain au service des diplômés chômeurs

Tapez « diplômés chômeurs » sur Google news. Qu’est ce que vous obtenez comme résultat ? Eh ben, 17 sur 20, soit la quasi-totalité, concernent le Maroc… Eh pourtant, « Maroc » ne faisait pas partie des mots clés de la requête !

Qu’est ce que cela suggère ? Est-ce que « Diplômé chômeur » est synonyme aujourd’hui de Marocain ? Evidemment non. Même dans les pays développés, il existe des diplômés chômeurs. Cette tendance, d’ailleurs, va crescendo, en raison, non seulement des crises économiques ici et là, mais surtout de l’outsourcing pratiqué par les multinationales, toujours avides de multiplier les gains. Cependant, la « mention très bien » (17/20) enregistrée par le Maroc est révélatrice du drame des diplômés chez nous, et du fait que le chômage les concernant est d’une dimension nettement plus importante.

Au milieu de ce chaos, Abdelkrim Samiri, un Marocain résidant en Suisse, propose un programme innovant permettant une formation de diplômés chômeurs en 6 mois afin de les aider soit à (re)trouver un emploi, soit à créer leurs propres entreprises. Ce programme a été lancé en Suisse, en 1996, par le Marocain, avec des résultats très probants. Fort de ce succès, Abdelkrim, récemment au Maroc, propose donc d’implémenter une version Marocaine du projet. Les coûts sont modestes, mais est ce que le gouvernement voudra y montrer de l’intérêt ?

Pour en savoir plus :

Diplômés chômeurs: La fin du calvaire?

Thursday, October 06, 2005

Zaki, héros ou vilain ?

"Ce que je sais le plus, finalement, sur la morale et les obligations de l’homme, je le dois au football…". Cette citation émane de l’écrivain Albert Camus, qui était gardien de but dans sa jeunesse. Le moins que l’on puisse dire, est qu’elle est très d’actualité à la veille de ce houleux Tunisie-Maroc qui nous attend ce week-end. Samedi soir, après le coup de sifflet final, la "morale" se fera toute petite devant la passion, la haine, l’euphorie, la déraison, l’extase, la colère, … toutes conséquence d’une émotion démesurée...

Dans ce climat, coté Marocain, rarement une personne aura mis en jeu toute son réputation, tout son statut comme ce sera le cas de Zaki, l’entraîneur national. Ce dernier, en une seconde, pourra devenir l’homme le plus adulé ou le plus haï au pays. Car, "ça prend seulement une seconde pour marquer un but", comme disait Brian Clough. Mais cette seconde fera couler beaucoup d’encre. Cette seconde fera écrire des pages et des pages par des journalistes, ou plumitifs qui, selon la tournure des évènements nous expliqueraient la « tactique naïve », « la grosse erreur » ,« le match perdu d’avance » dans un cas, ou « la grande intelligence de Zaki », sa « victoire tactique », « son assurance », « sa certitude de gagner » et « sa capacité phénoménale de mener les hommes et gérer les conflits socio-psychologiques, etc. », dans l’autre cas.

Techniquement, le mot qui reviendra souvent sera « tactique »: « Tactiquement, le Maroc a …”, « Le match sera ( a été) tactique », « Zaki a gagné (perdu) son match tactique face à Lemerre). Tactique, tactique, tactique… Si seulement ces "experts" de la tactique écoutaient ce que disait B. Clough, encore lui, « Les joueurs te font gagner des matchs, et non pas les tactiques. Il y a plein de bêtises sur la tactique racontées par des gens qui savent à peine comme gagner au domino ».

Pour encourager ses joueurs, Zaki ferait mieux de leur conseiller le jour du match : « Si vous êtes dans la surface de réparation adverse et vous ne savez pas quoi faire avec le ballon, mettez le dans les filets, et nous discuterons des différentes options plus tard » comme disait, un jour, Bob Paisley.
P.S. Indépendamment du résultat de Samedi, je pense que la prestation du onze Marocain a été très médiocre lors des éliminatoires. En plus du match nul contre la Tunisie at home, les Lions de l’Atlas ont perdu bêtement 6 points à l’extérieur face à des équipes faibles.

Tuesday, October 04, 2005

La photo du jour




Photo prise (source: AP), ce Mardi 4 octobre, à Derb Sultan à Casablanca. Le coup d’envoi du Ramadan est donné. Malheureusement, on n’a pas encore envisagé la distribution sur commande on-line pour les expatriés. Chebbakia.com, ce n’est pas encore pour demain. Pourtant, c’est un business bien prometteur. Avis aux intéressés…

Monday, October 03, 2005

Ramadan Moubarak

Le jeune du mois de Ramadan est le 4ème pilier de l’Islam, mais, curieusement, au Maroc, il est au top de la hiérarchie. Je l’explique par deux raisons : a) la passivité relative que l’observation de ce rite implique, et b) la grande marge culturelle que ce rite laisse aux fidèles (cuisine, coutumes Ramadanniennes, etc.) par rapport aux autres piliers de l’Islam.

Au Ramadan, on est censé manger moins, mais au Maroc, ce mois est généralement accompagné par une inflation de certains produits, par une consommation largement plus importante, qui, de plus, est concentrée dans une fourchette de 10-15 heures… Bonjour le diabète, le cholestérol, …

Au Ramadan, on est censé être plus tolérant, moins nerveux, plus conciliant, mais au Maroc, le taux d’adrénaline atteint des records difficiles à égaler … Cela a un nom : Tramdine…

Le mois de Ramadan est censé être un mois de spiritualité, mais au Maroc, c’est le mois des jeux de hasard par excellence. Allez savoir pourquoi.

Mais, au moins, au Maroc, au mois de Ramadan, l’esprit de famille reprend ses couleurs, quoique des couleurs moins vives qu’avant. Ce n’est pas rien.

Ramadan moubarak.

Sunday, September 18, 2005

L'arbitraire

On a beau chanter, qu’au Maroc, les annees de plomb, de l’arbitraire sont révolues. Mais ces qualifications sont généralement consacrées au champ politique. Dans la vie de tous les jours, l’arbitraire continue à faire office de système. L’histoire de Ait Sirahal en témoigne. Cet émigré en France a eu une altercation avec une personne dans un café, à Marrakech, où il passait ses vacances, la veille de son retour à son pays d’adoption. Quelques heures plus tard, il est décédé dans un commissariat après avoir été torturé… L’autre personne, elle, est relâchée car elle connaît des notables de la ville…

Le pire est que le commissaire, reconnu assassin de la victime, travaille toujours comme si de rien n’était. Lire les liens en bas de page de l’article en question pour en savoir plus sur le ridicule traitement de l’affaire par la justice, la parodie de justice plutôt.

Voilà qui nous fait rappeler, que dans certains aspects de la vie quotidienne, nous vivons toujours dans le moyen age. Il est fort à parier que la victime a été « lynchée » à cause (ou « grâce », du point de vue des tortionnaires !) des connaissances au haut niveau de l’autre protagoniste de la dispute.

Arbitraire, Clientélisme, Impunité : voici la « trilogie » gagnante pour les uns, celle qui hante la vie pour les autres. Pour des millions d’autres. Pour la racaille.

Sunday, September 11, 2005

L’équation islamiste selon Tel Quel

Dans son dernier éditorial, A. Reda Benchemsi (tiens bon, Reda, face au ridicule procès dont vous êtes victime !), parle de l’équation islamiste, plus précisément du PJD, dans le système politique Marocain. En résumé, le PJD, selon lui, est le parti ou la démocratie et la méritocratie sont les mieux respectées et appliquées en interne, et que, en conséquence, il dispose d’une base très impliquée. Seulement voilà, continue t-il, reconnaître cela est une chose, accepter le PJD au pouvoir en est une autre. Il dit être farouchement opposé à une éventuelle ascension du PJD pour des « raisons idéologiques ». Pour appuyer et conforter sa position, a posteriori ( !), il donne en exemple deux récents évènements. Dans le premier, survenant lors d’un forum du PJD à Kenitra, « un invité vedette a déclaré que l’ouragan Katrina qui a détruit la Nouvelle-Orléans était "un cadeau du ciel". Sous les acclamations des jeunes, malgré ce que cette assertion a de choquant. » Dans le second, « Cet été, Attajdid, si "modéré" soit-il devenu, a tout de même bruyamment protesté contre "la débauche et les mœurs déviantes" incarnées par les festivals musicaux gratuits… ». Ce qui fait du PJD, toujours selon Benchemsi, un parti efficace mais "à l’idéologie rétrograde, parfois à deux doigts du fascisme".

Quelques points en réaction:

1. Il faut saluer la sincérité de Benchemsi. Il relate les faits et donne, ensuite, son opinion, sans démagogie et hypocrisie, chères a certains de ses confrères, pour lesquels la fin justifie les moyens, et ont recours à toutes les ruses et à la désinformation pour discréditer l’adversaire. Il est révélateur, d’ailleurs, que cette sincérité vient d’une personne travaillant pour un journal indépendant et non partisan de tel ou tel parti politique.

2. Il faut condamner sans réserve le dérapage de cet invité déclarant que la tragédie de New Orleans était un "cadeau de Dieu". Décidément, après l’affaire Tsunami, on remet ça avec Katrina. N’est-il pas venu le temps d’apprendre ? Ce que je reproche à Reda, néanmoins, c’est croire ou faire croire, consciemment ou non, que ce genre de dérapage est inhérent à "ces raisons idéologiques". Qu’il ne s’agit pas plutôt d’un dérapage instrumentalisant la dite "idéologie". Une telle attitude ne fait que favoriser le dialogue des sourds entre les uns et les autres, ne fait qu’envenimer les malentendus, alors notre société a besoin d’un dialogue serein, dépassionné, pour établir une démocratie sur des bases solides.

3. Concernant "la débauche et les mœurs déviantes", là, il y a un vrai dérapage de Reda. Dans toutes les sociétés du monde, même les occidentales, il existe des associations, des institutions qui protestent contre "la débauche et les mœurs". A des degrés divers, il est vrai, mais elles existent. Aux US, en France, partout. Et on ne parle pas alors de fascisme et d’idéologie rétrograde ! Bien entendu, il ne s’agit pas ici d’affirmer que le PJD avait raison ou non, puisque je ne sais même pas ce à quoi il se referait. Mais une société est composée de plusieurs franges et chacune prône un modèle plus ou moins conservateur, plus moins libertaire, etc. Et sortir les mots "fascisme", "rétrograde", chaque fois qu’un modèle ne nous plait pas est un peu malsain !

Wednesday, August 31, 2005

Les auteurs présumés de Zotob sous les verrous

Hmm, on peut mourir à trop pratique des jeux sur ordinateur, ou se retrouver en prison si on fait circuler des virus sur le web, comme cela vient d’arriver à notre compatriote Farid. J’ai regardé par hasard, il y a quelques jours, une émission sur le hacking et comment les hackers pouvaient entrer dans les disques durs sont que leurs propriétaires ne s’en rendent compte. L’un des moments forts de l’émission, à mon avis, est quand l’un des interviewés critique Microsoft, en lui reprochant de vendre ses produits sans se soucier des garanties sécuritaires. Il ajoute que, dans les divers domaines, industriels ou non, il existe des conditions sur la qualité du produit à vendre, qu’il faut respecter, mais pas en informatique. Bon point.

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mardi 30 aout 2005, 19h22
Les auteurs présumés de Zotob sous les verrous

Deux hommes, auteurs présumés du virus Zotob, ont été identifiés grâce aux investigations du FBI et mis sous les verrous au Maroc et en Turquie.

Deux hommes, auteurs présumés du virus Zotob, ont été identifiés grâce aux investigations du FBI et mis sous les verrous au Maroc et en Turquie. Il s'agit d'un jeune marocain de 18 ans, Farid Essebar, et d'un Turc de 21 ans, Atilla Ekici. Les enquêteurs américains étaient sur le coup depuis le mois de mars et l'apparition d'un premier virus, Mytob.

En coopération avec Microsoft et les autorités policières des deux pays concernés, ils sont parvenus à déterminer qu'Essebar a créé à la fois Mytob et Zotob, et les a ensuite vendus à Ekici. «Nous pensons qu'Essebar en a tiré un gain financier», a expliqué l'un des directeurs du FBI.

Les deux suspects seront jugés dans leur pays respectifs. Les chefs d'inculpation n'ont pas encore été définis, mais l'agence américaine participe activement à monter le dossier à charge, tout en cherchant à déterminer si d'autres complices sont impliqués.

Monday, August 22, 2005

De l’humour Brésilien et son extension au Maroc

Les Brésiliens aiment l’autodérision. Voici une de leurs citations favorites :

- En URSS, tout est interdit, même ce qui est permis.
- En Allemagne, tout est interdit, sauf ce qui est permis.
- Aux Etats Unis, tout est permis, sauf ce qui est interdit.
- Au Brésil, tout est permis, même ce qui est interdit.

Et au Maroc, qu’est ce que vous avez envie de dire ? En ce qui me concerne :

- Au Maroc, tout est permis … ou interdit (dépendamment de l’humeur du moment).

Saturday, August 06, 2005

Les enjeux de l’émigration

Mes amis les immigrés, si vous avez le blues, le mal du pays, consolez-vous, au moins, avec le sentiment que vous participez activement au développement de notre pays. A en croire les chiffres publiés récemment [1], les transferts d’argent des Marocains résidant à l’étranger s’élèvent cette année à 10% du PIB ! En fait, il s’agit d’une sous estimation, puisque ni l’informel, ni des secteurs tels que le transport aérien ne sont comptabilisés. Qu’importe, la contribution est phénoménale au point que le Maroc occupe la 4ème place mondiale des transferts [2], derrière l’Inde, le Mexique et les Philippines ! Classement flatteur qui montre, si besoin est, l’attachement des « zmagrias » à leur Maroc chéri…

Pour l’instant, la question d’émigration est une aubaine pour le gouvernement. Elle fournit, on l’a vu, des retombées colossales en devises. Elle permet, de plus, d’alléger substantiellement le problème de chômage at home. Sans oublier qu’elle participe activement dans la promotion touristique du pays; de nombreux touristes ne sont-ils pas venus au pays uniquement grâce à leur connaissance d’amis marocains ?

Seulement voilà, il existe aussi un revers de la médaille. Comme le montre [1], les transferts d’argent émanent surtout des 1ère et 2ème générations (parlant d’Europe), et concernent en grande partie (83%) l’acquisition de maisons. La 3ème génération semble moins attachée au pays. Le gouvernement, conscient de ce problème, veut lancer des stratégies à même d’encourager l’investissement pour ses enfants émigrés. C’est louable. Mais je crains que le problème dépasse largement des initiatives de ce genre. Plus que la facilité d’investir, c’est le manque d’attachement au pays à mesure que les générations se succèdent qui est inquiétant. La première génération construisait des maisons car elle avait la certitude de retourner au « bled ». Ce n’est plus le cas pour la génération actuelle. En plus d’encourager le « business », le Maroc devrait lancer un pont culturel, médiatique et historique avec ses enfants résidant à l’étranger. Si on aime les voir investir, ils doivent connaître d’abord le pays et sentir des attaches très fortes…

Autre point négatif. A part les visas étudiants ou d’émigration pour le Canada, l ‘obtention de ces derniers devient très difficile. Le drame est que l’émigration, du coup, concerne les diplômés ou les futurs diplômés. Ce sont les forces vives du pays qui partent. Ce n’est pas grave, « se dit» le gouvernement : les « désertions » de boulot seront vite comblées par les nouveaux demandeurs et cela atténuera le problème du chômage. De plus, les nouveaux émigrés vont transférer également des devises. Cela n’est vrai, toutefois, qu’à court ou moyen terme. Les conséquences à moyen ou long terme peuvent être terribles. Une fois que les transferts deviendraient dérisoires et que des pays comme le Canada fermeraient leurs frontières, le Maroc se trouvera et sans devises et sans des diplômés expérimentés indispensables pour son décollage économique définitif. Pire, il devra alors faire face à une demande d’emploi plus forte !

Quoi qu’il en soit, il faut avoir conscience d’une chose : Les transferts d’argent, le tourisme, etc., sont des facteurs économiques qui ne doivent pas être considérés comme essentiels. Espérés certes, mais seulement accessoires, car volatiles. Un luxe quoi ! C’est le capital humain qui doit être investi et qui sera le gage de l’essor de demain si l’emphase est placée sur la recherche et le développement dans les domaines industriel, technologique, informatique et de nombreux autres secteurs.


[1] L'économie chérifienne menacée à cause de l'évolution des comportements des MRE

[2] Les transferts d'argent des Marocains émigrés en nette augmentation

Monday, August 01, 2005

La réforme du code de la nationalité approuvée

Et un dossier de moins ! La reforme tant attendue, en faveur du droit des enfants d’une mère Marocaine, d’hériter automatiquement de sa nationalité, indépendamment de la nationalité du père, vient d’être entérinée.
Il était temps, tellement, dans ce registre, l’injustice était criante à l’égard des femmes. Je présume que la nouvelle loi est retro-active et qu’en conséquence, les consulats marocains, notamment, seront assaillis par les demandeurs de nationalité. Bref, la dite injustice est derrière nous maintenant, et nous ne pouvons que nous en féliciter !

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samedi 30 juillet 2005, 19h20

Maroc: une réforme du code de la nationalité plus favorable aux mères

RABAT (AP) - Le roi Mohammed VI a annoncé samedi à Tanger une réforme du code de la nationalité lors de son discours à l'occasion de la Fête du trône qui célèbre l'anniversaire de son intronisation le 30 juillet 1999.

La nationalité marocaine pourra dorénavant être transmise par la mère, a annoncé le souverain dans son discours rapporté par l'agence MAP. Jusqu'à ce jour, seuls les enfants nés de père marocain, de mère marocaine mariée à un apatride ou de mère célibataire marocaine pouvaient prétendre à la nationalité marocaine.

La question de la nationalité a été soulevée par les associations de défense des droits des femmes après la réforme du code de la famille (ou Moudawana), entrée en vigueur en février 2004. La Moudawana a accru les droits des femmes et placé l'autorité familiale sous la responsabilité conjointe et égale des époux, mais le code de la nationalité laissait subsister un traitement inégalitaire entre hommes et femmes.

Des milliers d'enfants nés de mères marocaines mariées à des non-Marocains doivent toujours demander des titres de séjour pour vivre au Maroc puisqu'ils ne possèdent que la nationalité de leur père. L'annonce du roi devrait donc simplifier de nombreuses situations familiales.

Le code de la nationalité n'avait pas été modifié depuis 1958 et nécessitait des ajustements pour répondre aux réalités actuelles. Par exemple, les enfants nés de pères inconnus y sont toujours désignés sous le terme injurieux de "bâtards". AP

Friday, July 29, 2005

Expliquer n’est pas Justifier le terrorisme

J’allais écrire un billet sur les causes du terrorisme, mais au vu des articles et débats que j’ai lus récemment suite aux derniers actes terroristes, j’ai senti que de par le monde, il existe toujours une confusion flagrante sur la différence entre l’explication et la justification du terrorisme. Je préfère, dés lors, d’abord discuter des tenants et des aboutissants de cette confusion, discussion qui me servira d’introduction avant d’attaquer plus tard, la question fondamentale des causes du terrorisme.

Cette confusion est, soit due à des lectures naïves, pauvres et tronquées des événements, combinées avec un esprit critique presque inexistant et une autocensure inquiétante, soit elle est entretenue sciemment par des opportunistes dont le cynisme les pousse à profiter de crises de ce type pour faire avancer leurs agendas : Islamophobie, clash des civilisations, l’entretien du sentiment de la peur à l’encontre de tous qui ne sont pas « nous ». Dans les deux cas, cette confusion est grave.

Essayer d’expliquer les « causes » du terrorisme, non seulement est salutaire mais est obligatoire. On ne peut prétendre vouloir s’attaquer au terrorisme sans faire un inventaire assez exhaustif des éléments ayant une incidence de près ou de loin sur ce phénomène.

Pour lever cette confusion, rien de mieux qu’aborder la problématique en sens inverse. Par sens inverse, je veux dire des actes terroristes perpétrés par des occidentaux à l’encontre des musulmans. Comme ceux ayant été commis par quelques Américains, qui juste après le 11 septembre 2001, ont attaqué des mosquées (bombes, etc.), et même assassiné des personnes ayant un look asiatico-arabe. La même dérive s’est produite, récemment, à Londres, après les attaques terroristes, quand un touriste pakistanais, fut assassiné par quatre jeunes Londoniens, en plus d’un nombre assez élevé d’actes d’agression à l’encontre des musulmans.

Comment peut-on, dans ce cas, expliquer ces assassinats ? Par l’évidence même. Ce sont les attentats de New York et de London qui ont servi de catalyseurs à ces criminels « occidentaux » pour commettre leurs actes. Sans les attentats de triste mémoire, il est fort à parier que ces réactions terroristes n’auraient pas vu le jour. Est ce que les attentats de New York et de London leur donnent, pour autant, des justifications ? Absolument pas. Pour les même raisons qu’on ne cesse de répéter : Aucune cause ne peut justifier l’assassinat et les agressions contre de civils. Aucune. Ces personnes ont juste perdu toute raison après les évènements tragiques qui les ont secoués et ont agi de manière inacceptable. Si on accepte cet état de fait, on doit accepter tout autant l’analyse des évènements en sens inverse, évènements qui font la une des médias continuellement, à l’heure actuelle.

C’est ainsi, seulement, que l’on peut analyser de manière sereine les causes du terrorisme, loin des clichés naïfs, cyniques, ou qui, simplement, ont perdu tout lien avec la réalité. Et c’est ainsi, seulement, que l’on peut dégager des stratégies capables de venir à bout du terrorisme, ou, du moins, en réduire significativement les manifestations.

Tuesday, July 19, 2005

Forum social maghrébin

Belle initiative que celle de créer un forum social maghrébin. De par l’agenda du forum qui sans doute s’inscrira dans celui du forum social mondial (organisé pour la première fois à Porto Alegre en 2001), à savoir la lutte contre la globalisation aveugle, etc., la création de ce genre de forums contribuera significativement à enrichir le dialogue entre les citoyens du Maghreb Arabe, dialogue bien pauvre jusque là, il faut l’avouer. Ce n’est qu’en dialoguant activement avec nos voisins que nous nous connaîtrons mieux, que nous serons en mesure de dépasser nos mésententes et convaincre les gouvernements de la nécessite de cristalliser l’idée de l’Union du Maghreb Arabe.
Evidemment, pour en arriver là, il faut trouver une solution au conflit du Sahara, et c’est justement ce genre de forums qui pourra nous y aider. A ce titre, Mohamed Benhammou, membre du comité de pilotage du Forum Social marocain, note, à juste raison : « Pour ce qui est du problème du Sahara, cela ne nous empêche pas de discuter et d'expliquer nos thèses légitimes avec tout le monde. Le dialogue est notre devise avec tous, car notre conviction en notre cause est inaliénable et c'est le fond même du règlement politique sur lequel le Maroc est d'accord. ». Effectivement, nous, Marocains, avons suffisamment d’arguments à faire valoir à nos frères Algériens pour démontrer la marocanité du Sahara. C’est à mon avis une voix nécessaire pour espérer un dénouement favorable. Sinon, peut-on espérer quelque chose en s’adonnant aux insultes comme nous en avons témoigné lors de la peu glorieuse confrontation sur Al-Jazira entre le directeur de Al-Alam et un ex-député Algérien, il y a quelques mois? Rien, évidemment. Pour obtenir quelque chose, il faut se montrer très patient, éviter de trop regarder dans le miroir, aller de l’avant et surtout rester concentré sur l’objectif.

Articles liés:

Tuesday, July 12, 2005

Srebrenica, dix ans après

"Génocide" , "épuration ethnique", "crime contre l’humanité", etc., les mots et les slogans ne manquent pas aujourd’hui pour qualifier les crimes barbares commis par les Serbes contre les musulmans de Bosnie (plus de 8000 victimes!!!), il y a tout juste dix ans. Des exécutions froides et collectives aux viols collectifs (devant les pères et frères pour rendre la chose encore plus abjecte et humiliante), on aura tout vu. Les coupables ? Au-delà des Serbes bien sur, on n’oubliera jamais la lâcheté des grandes puissances occidentales qui ont laissé faire tout en ayant connaissance des crimes sur place. L’intervention Américaine, autant salutaire soit elle, fut plus cynique qu’autre chose. On ne pourra jamais nous faire croire que le problème relevait plutôt de l’organisation archaïque de l’ONU ou de conneries de ce type. Et pour cause, imaginons un instant Israel attaqué par les musulmans ou si un autre pays « civilisé » occidental est attaqué, et on verra tout de suite que si mésentente il y a, c’est au niveau de minutes et non de jours…
Ou en est-on, dix ans après ? Eh ben les bourreaux serbes, à leur tête, Ratko Mladic et Radovan Karadzic, respectivement chef de guerre et leader politique des Serbes de Bosnie sont toujours en fuite. Pire, comme nous le fait savoir Jean-Marcel Bouguereau, le rédacteur en chef du Nouvel Observateur, ces deux hommes sont considérés aujourd’hui encore comme des héros par une bonne partie de la population serbe !!! Dans ce cas, on ne peut éviter la comparaison entre ces deux criminels Serbes et le non moins criminel Bin Laden. Ce dernier, également, est considéré comme un héros par une partie de la population arabo-musulmane. La différence principale, cependant, est que la plupart des intellectuels ou supposes tels en Occident, genre Thomas Friedman, passent leurs temps a parler du statut de héros de Bin Laden chez certains musulmans sans jamais essayer de faire une analyse plus poussée et surtout sans jamais éviter l’essentialisme en rappelant leurs lecteurs, par exemple, que ces dérives ont eu également lieu chez les non musulmans, chez les chrétiens comme les Serbes ici, ou bien chez les Israéliens lors de la « fameuse » boucherie de Sabra et Chatilla dont le « héros » ne fut autre que l’actuel Premier ministre israélien, Sharon. Ce « deux poids deux mesures » est non seulement très mal ressenti par les musulmans du monde entier, mais j’ai la conviction qu’il a eu une incidence non négligeable dans fertilisation du terrorisme chez ces derniers.
Lire
1. Un calcul cynique, par Jean-Marcel Bouguereau, le rédacteur en chef du Nouvel Observateur.
2. Les marches des femmes de victimes, par Tuzla, correspondance particulière de l'Humanité.

Tuesday, June 21, 2005

Le scandale de pornographie à Agadir

Le scandale des photos pornographiques d’Agadir ne finit pas de faire parler de lui. Rappelons les faits : un pervers belge, du nom de Philippe Servaty, alors journaliste du quotidien « Le soir » fait des voyages réguliers à Agadir, promet la « lune » et le « paradis » à ses conquêtes d’un soir, et obtient sans difficultés le consentement de ses dernières pour, non seulement passer à l’acte sexuel, mais pour faire des photos pornographiques d’une obscénité rare. Le belge, par la suite publiera ces photos sur Internet… Les médias marocains, avec à leur tête Tel Quel, en ont fait quelques échos. Tel Quel, dans son numéro qui sera en ligne dans quelques jours, a fait état des échos dans en Belgique où l’indignation est générale et des poursuites contre Servaty sont envisagées.

Rapidement, ce scandale m’inspire les réflexions suivantes :

1. D’abord, il va sans dire que ce scandale n’a vu le jour qu’à cause (ou grâce) à la diffusion des photos sur le Net. Des histoires de ce type ne sont plus rares au Maroc, malheureusement. Sur le site http://petition.canalblog.com/, Nadia nous apprend que la chaîne de TV Al-Arabiah en a aussi parlé. En vérifiant, j’ai constaté que Al-Arabiah est allée encore plus loin. Elle a consacré tout un dossier à la « prostitution marocaine » dans les pays du golfe, dans les boites de nuit … Israéliennes, etc. Il est fait mention, également, de la prostitution homosexuelle et d’autres scandales liés au commerce de la prostitution.

2. On ne peut plus se recroqueviller derrière l’excuse éternelle de la pauvreté et la misère pour expliquer ces scandales. En témoignent les photos pornographiques dégradantes que toutes ces femmes ont accepté sans vergogne de faire. Se faire uriner dessus, se prêter à des séances de photos pornographiques avec un voile sur la tête ou en position de prière va évidemment au-delà de la misère ou des promesses de mariage. Il faut bien se rendre à l’évidence. Les causes sont à chercher ailleurs. La principale à mon avis, est ce matérialisme sauvage, phénomène assez récent qui a gagné, sans préavis, les esprits de la société Marocaine. La disparité économique croissant de manière vertigineuse a corrompu les valeurs de la société. La drogue, la corruption, l’émigration, une mentalité fondée généralement sur le « paraître » plutôt que le « être », les chaînes satellitaires pornographiques disponibles un peu partout dans les foyers Marocains, et d’autres facteurs ont fait que des personnes n’acceptent plus une vie modeste mais décente comme auparavant. Elles veulent accéder à la richesse et au luxe qu’elle qu’en soit la manière. Le pire est que les générations de leurs parents (certaines, je ne généralise pas, évidemment) ont également capitulé devant les promesses et les nouvelles portes au luxe, ouvertes devant leurs filles (ou fils). Luxe qu’elles n’ont pas eu le loisir de vivre dans leur jeunesse.

3. Le projet de 10 millions de touristes est un très bon plan. Aussi faut-il le préparer minutieusement pour qu’il ne se transforme pas en une dérive dont les conséquences seraient très néfastes sur tous les plans. Sur l’article de Tel Quel à paraître, on apprend que Servaty, après avoir diffusé les photos sur Internet, a reçu des emails de gens le priant de leur filer des tuyaux leur permettant de répéter les mêmes « prouesses » chez nous…

4. Les conséquences à moyen terme de ces histoires, qu’elles deviennent publiques ou non, pourraient être dangereuses. Nous savons tous que le marché de la prostitution est très prolifique. Il attire systématiquement la mafia qui, au départ, commence de manière soft mais, après, fait des prostituées des esclaves. La mafia associera bien sur la drogue à son entreprise, et une fois la concurrence devient rude, elle passe aux armes. Ce n’est sûrement pas ce que les 10 millions de touristes potentiels aimeraient entendre. Et ce n’est sûrement pas bon pour la sécurité de notre pays.

5. Ces histoires à répétition rendent, également, vulnérable une bonne partie de la population aux discours incendiaires de certains prêcheurs d’un Islam très dur, étroit d’esprit, qui refuserait tout ce qui est lié de près ou de loin à la modernité, en faisant un amalgame entre l’évolution naturelle d’une société vers de nouveaux horizons, et la dégradation des mœurs et la débauche qu’il faut condamner sans renoncer à la modernité.


Pour en savoir plus :

Tel Quel: Enquête. Pornographie et abus de confiance

Tel Quel : Scandale porno d’Agadir. Sur la piste du coupable

Tel Quel : Scandale porno d'Agadir. Le filet se ressèrre (article à paraître dans quelques jours).

Le dossier d’Alarabiah

Tuesday, June 14, 2005

Vers la théocratisation et l’éthnisation du paysage politique Marocain ?

D’abord l’agrément (1) du ministère de l’intérieur donné, il y a une semaine, à la création d’un second parti islamique "Alternative civilisationnelle" ("Al Badil al Hadari"). Ensuite, encouragée par cette autorisation, la demande (2) solennelle, quelques jours plus tard, de militants de la cause berbère pour la création du Parti démocratique amazigh (PDA). Le PDA ne manque pas d’arguments pour revendiquer son entrée sur la scène politique. Au projet de loi voulant interdire tout référentiel religieux ou ethnique, il oppose la non cohérence de l’application de « deux poids deux mesures », puisque le PJD et le Badil Al Hadari, eux, ont bien été autorisés. Pour déjouer ce projet, le PDA affirme, de plus, que le parti est ouvert à toutes les ethnies, même si la manœuvre est plus politicienne qu’autre chose (on voit mal le parti attirer un nombre suffisant de citoyens non amazigh.). La cohérence et la logique sont là, et c’est cela ce qui importe.

Deux mots sur Al Badil Hadari: D’abord une bonne nouvelle pour les partis Marocains traditionnels : L’entrée en jeu du Badil aura vraisemblablement pour conséquence l’affaiblissement du PJD, leur coriace adversaire, qui verra certaines de ses voix, déçues ou dissidentes, se tourner vers le nouveau venu. Ensuite, comme le souligne Mustapha Mouâtassim, le secrétaire général du parti, elle permettra d’enrichir « la différence au sein d'une même sensibilité (islamique) », et fera en sorte que personne « ne monopolise le référentiel islamique au Maroc ». Ce dernier point est capital, à mon avis. L’assurance de ne pas voir le référentiel islamique monopolisé par un seul parti aidera à lever la confusion entre Islam et partis islamiques, confusion criante dans le monde arabo-musulman contemporain. Elle rendra, ainsi, plus aisée, la désacralisation des partis politiques islamiques sans pour autant désacraliser l’Islam lui-même. Arriver à ce stade sera primordial pour mener des débats politiques dans la sérénité. Mises à part ces précisions, Al Badil al Hadari clame (3) haut et fort que son credo principal est la promotion de la démocratie et qu’il n’hésitera pas à nouer une alliance avec tout parti démocratique dont le projet de société est similaire, qu’il soit « laïc, de gauche, de droite ou islamiste ». Ce que je trouve très salutaire. Que les alliances portent sur les valeurs, les projets et non sur les idéologies leur donnant naissance !

Notons, au passage, que le refus initial du pouvoir d’autoriser Al Badil était du à la supposée identité chiite (4) de ses membres, « accusation » démentie par les concernés. Mais cela (le refus) est une autre histoire…

En dehors de ces considérations, s’achemine t-on vers une éthnisation et une théocratisation du paysage politique marocain ? Peut être, mais je pense qu’il s’agit d’une phase normale, dont il ne faut pas exagérer la portée. Au-delà des soupçons et/ou calculs des uns et des autres, les islamistes lancent des partis politiques afin de, entre autres, faire respecter l’identité musulmane du Maroc, les berbères, afin de faire respecter l’identité amazigh, etc. Quoi de plus normal si les différentes sensibilités se sentaient (sentent), à raison ou à tort, opprimées et bafouées dans leur droit identitaire, etc., et réagissent en conséquence. Du moment, bien sur, que les structures politiques sont adéquates et ne permettent pas l’anarchie ou la mainmise d’un parti sur les autres, ce qui est heureusement le cas dans notre pays. Une fois les différentes frustrations (identitaires, religieuses) libérées, l’avenir appartiendra aux formations politiques qui sauront tenir compte des différentes sensibilités (ethnique, religieuse, laïque, féministe, etc.), écouter leurs aspirations et dissiper leurs craintes, tout en proposant un projet de société global, solide et sans qu’il soit centré sur des références religieuses ou ethniques.

Références du billet

Saturday, June 04, 2005

Le mythe de « Bent Lblad »

Le billet que j’ouvre, part d’une statistique révélée, dans notre discussion sur les écoles Américaines au Maroc, par notre amie Blue Velvet : « dans le resencement cite par Karim, figure une donnee tres interessante: le taux des Marocains non-maries est le plus haut de tous les Arabes :)) ». Les raisons ? plusieurs selon BV:

« -le mythe de Bent lblad, la seule, l'unique, l'introuvable perle :) (Regardez les annonces sur wafin.com si vous pensez que j'exagere).
- Soyons serieux: Je crois que pour beaucoup, qui vivent sur deux petits boulots, parfois plus, la vie est difficile et ne permet pas de fonder un foyer.
-Ceux qui ont une situation passent pas le "papillonage affectif", se disent qu'ils ne vont pas rester eternellement aux US. Les annees passent, ete apres ete, ils rentrent au Maroc en vacances mais il est difficile de rencontrer la perle rare.
- je pense que les Marocains sont exigeants et originaux. Quelque part, ils ont raison...
»

Ce que je remarque, en lisant les causes que tu avances, BV, est que leur validité (ou non, pour rester objectif) concerne tout autant les Marocains vivant au Maroc que ceux d’Europe ou d’Amérique du Nord. A des degrés divers, il est vrai, certaines pouvant même passer d’une extrémité à une autre. Ceci juste pour affirmer que le sujet concerne tous les Marocains quelque soit leur lieu de séjour. C’est un clin d’œil à nos amis d’Europe et du Maroc!

Pour le reste, BV a également précisé : « I might be wrong. Comme on dit, c'est l'esquisse du commencement du debut d'une reponse. » Eh ben, pour faire le tour de ces quatre phases, je présume qu’il y aura de quoi écrire un livre ! A la mesure de la passion suscitée par le sujet… Sans tarder, je ne vais pas émettre de réaction personnelle à ce stade; je ne veux pas «corrompre» l’esprit de départ des tes réflexions. Pourrais-tu, donc, nous en dire davantage, BV, sur les points que tu as soulevés et éventuellement sur d’autres? A toi l’honneur!

Wednesday, June 01, 2005

Les Français du Maroc ont voté "oui" à la Constitution européenne

"RABAT (AP) - Le "oui" à la Constitution européenne l'a largement emporté dimanche parmi les Français résidant au Maroc, dont 83,84% ont approuvé le traité, a annoncé l'ambassade de France à Rabat lundi. Quelque 5.929 Français se sont prononcés en faveur de la Constitution, contre 1.143 qui l'ont rejetée. La participation a toutefois été assez faible avec un taux de 52%, soit 7.145 votants sur un total de 13.756 inscrits.
La communauté française au Maroc, en pleine expansion depuis 2002 et l'une des plus importantes en dehors de l'Union européenne, est estimée à quelque 30.000 personnes, la moitié d'entre elles n'étant pas inscrites dans les différents consulats du royaume. AP"

Intéressants ces chiffres. La discordance entre le pourcentage du "oui" des Français du Maroc et le pourcentage national est frappante. La différence avoisine les 40% ! On aurait aimé en savoir davantage sur les raisons d’une telle disparité en questionnant directement les concernés. Ou la réponse, tiendrait-elle simplement dans le fait que ces Français étant des émigrés, ils sont moins hostiles à aller vers l’autre (l’Europe dans ce cas), à découvrir et à oser en quête d’un avenir meilleur, en plus du fait qu’ils ne souffrent pas de la crise sociale at home en France ? Je n’en sais rien.

Saturday, May 21, 2005

Pourquoi les Marocains boudent les livres?

Dans cet article publié par le quotidien Aujourd’hui Le Maroc, quelques personnalités livrent leurs impressions sur les raisons derrière la problématique du faible taux de lecture des livres au Maroc. Ce sujet me fait penser à Ahmed Bouzfour, ce nouvelliste qui avait refusé un prix littéraire en protestation à la politique sociale marocaine et au faible taux de lecture dans ce pays.

Friday, May 13, 2005

Polémique au Maroc : les évangélistes sont-ils une menace?

Décidément, le prosélytisme mené par les télé-évangélistes au Maroc continue de faire couler beaucoup d’encre. Cette polémique dure maintenant depuis des mois et a suscité un énorme intérêt, au point que même des médias internationaux, dont Le Monde, en avaient fait écho. Voici une interview donnée par un Pasteur de Casablanca, tentant de mieux éclaircir la réalité du phénomène. Le moins que je puisse dire sur cette question est qu’elle est bien complexe. Au delà du débat légitime sur la liberté d’agir et de conscience en religion, il est difficile de dresser, de manière cohérente, une ligne claire entre, d’une part, tirer profit des problèmes d’une société, et d’autre part, exploiter abusivement ces mêmes problèmes, pour prêcher une doctrine donnée.
Jallal

Monday, May 09, 2005

Abdelhamid Al-Ansari répond à certaines questions chaudes

Je crois que notre ami Abdelhamid Al-Ansari commence à avoir la cote sur notre blog. Tout le monde connaît l’institut Memri dont la tâche principale est de chercher tout article ou déclaration haineuse de certains musulmans dans les médias arabes et les traduire et les reproduire ensuite sur le site memri.org. L’objectif, bien sur, est de véhiculer une image rétrograde de l’Islam à travers le monde… Ici, néanmoins, Memri se limite à traduire une interview de Abdelhamid Al-Ansari avec le quotidien Qatari Arraya. En lisant cette traduction, je me suis trouvé en accord avec pratiquement toutes ses opinions. Je crois que les points qu’il souligne sont d’une grande importance et méritent un large écho dans le monde arabo-musulman.
Jallal

Monday, May 02, 2005

Les chiffres alarmants de la mendicité au Maroc

500.000 mendiants! Ce chiffre effrayant a été annoncé par la Ligue marocaine pour la protection de l'enfance, résultat d’une étude réalisée en collaboration avec l'Entraide nationale et le ministère de la Santé. Seul point positif est que l’on commence finalement à se pencher sérieusement sur ce cancer qui mine profondément l’état de santé de la société Marocaine. En témoigne cette étude sérieuse qui apporte des révélations très intéressantes sur le phénomène de la mendicité, ses causes et ses méthodes. Seul point positif, disais-je, car la pauvreté, tout le monde en convient, est une des causes derrière d’autres « maladies » dont souffre la société marocaine, telles que l’analphabétisme, la malnutrition ou l’extrémisme. Reste à savoir pourquoi le Maroc en est arrivé là. Il va sans dire que les raisons sont très nombreuses et j’ai pas l’intention ici de les discuter toutes mais je cite une qui est capitale. Le Maroc n’a jamais abordé l’éducation de manière sérieuse ni même eu la conviction que l’éducation et la science sont les moteurs d’une économie en bonne santé. En occident, on étudie d’abord pour créer et produire. Au Maroc, la finalité première ou la conséquence de l’éducation a été toujours de produire des enseignants. Dés lors, il n’est pas surprenant de constater la saturation à ce niveau, constatée depuis plusieurs années maintenant. La recherche et le développement n’ont jamais eu la place qu’elles méritent et continuent toujours de faire cruellement défaut au Maroc. Or, on constate rapidement que pratiquement tous les pays émergents ont fait de la question de la recherche et du développement une de leurs priorités. La Malaisie, l’Inde et Brésil en sont des exemples concrets. Sans l’investissement dans la recherche et le développement et la créativité qui en découle, le Maroc comme d’autres pays, sera toujours condamné à pratiquer l’économie de bricole, en dévaluant le dirham par exemple, en privatisant un par un tous les secteurs d’économie (le problème ici n’est pas tant la privatisation mais que ce soient presque toujours des compagnies étrangères qui gagnent l’appel d’offres), en misant trop sur le tourisme ou l’argent issu de l’immigration, etc. Ces stratégies peuvent être parfois bénéfiques, mais elles sont ou bien des moyens à court terme ou bien trop dépendantes de la situation politique et des conflits dans le monde.
Jallal

Sunday, April 24, 2005

Driss Basri perd un procès en diffamation contre un journaliste marocain

La tombée en disgrâce de Driss Basri continue. Maintenant, il perd le procès qu’il a intenté à Maroc Hebdo. Visiblement, Basri apprend tard qu’on ne peut soudoyer la justice française aussi facilement qu’il le faisait au Maroc quand il en était l’homme fort.
Jallal
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Driss Basri perd un procès en diffamation contre un journaliste marocain

22-04 17:33:51
L'ancien homme fort du régime du défunt roi du Maroc Hassan II, Driss Basri, a perdu vendredi à Paris le procès en diffamation qu'il avait intenté à un journaliste marocain le mettant indirectement en cause dans le développement de l'intégrisme marocain à l'origine des attentats de Madrid.

Dans un article publié le 4 juin 2004, Maroc Hebdo s'attaquait à celui qui fut pendant un quart de siècle le puissant ministre de l'Intérieur du Maroc, l'accusant d'avoir préféré s'enrichir plutôt que d'utiliser l'argent du royaume à résorber les bidonvilles dont étaient issus les auteurs présumés des attentats de Madrid de mars 2004.

Le journaliste accusait également M. Basri, qui réside actuellement en France, d'avoir mis en place un "système aux allures de Cosa Nostra", nourri par une "propension pathologique d'accumulation gargantuesque et de pactole pharaonique pompé sur la misère des autres".

La 17ème chambre du tribunal correctionnel de Paris a estimé que ces assertions étaient diffamatoires mais a laissé au journaliste le bénéfice de la bonne foi.

Le tribunal a notamment considéré que les exigences auxquelles étaient soumis les journalistes français pour apporter la preuve de leur bonne foi (particulièrement concernant l'obtention de documents prouvant la véracité de leurs affirmations, ndlr) ne pouvaient être aussi fortes pour les médias marocains, compte tenu de "l'histoire et des modalités actuelles d'exercice des libertés publiques au Maroc".

Le tribunal a par ailleurs souligné que la partie civile elle-même avait reconnu l'existence d'un "système Basri" et les poursuites pénales visant certains de ses proches, notamment l'ex-gouverneur ainsi que l'ancien maire de Casablanca, pour des détournements de fonds.

Friday, April 22, 2005

Dénouement controversé de l'affaire Barthez

Comme le precise cert article, c'est plutot l'affaire d'état qui a primé dans le jugement de Barthez.

Jallal

Une exportation Marocaine pas tout a fait orthodoxe

Immigrer a l'etranger pour ameliorer sa situation economique entre autres est bien. Mais certains ne peuvent se defaire de certains vices... Voir cet article pour en savoir davantage.

Jallal

Wednesday, April 20, 2005

Tariq Ramadan et le moratoire

Tariq Ramadan a lancé, il y a quelques semaines, un moratoire sur les chatiments corporels dans les pays musulmans les pratiquant à l’heure atuelle. Comme prévu, cet appel a suscité passion et indignation aussi bien chez les “traditionnalistes” qui voient dans cet appel une capitulation de Tariq face à l’”Occident”, que chez les “modernistes” qui y voient un cripto-islamisme caché de maniere subtile par un “double discours” . Dans mon premier commentaire sur le moratoire, j’ai envie d’abord de parler de ce fameux “double discours”.

Tariq Ramadan n’est pas un citoyen ordinaire, c’est un intellectuel qui a aujourd’hui une grande influence en Europe et en France en particulier. Il commence aussi à se faire entendre dans d’autres coins du monde. Il serait donc très maladroit, vu sa position, qu’il se prononce contre les châtiments corporels sans préavis. Une telle position le condamnerait pour toujours dans les pays ou ces châtiments se pratiquent. Tariq Ramadan n’est pas intéressé par offrir un discours sexy, à la manière d’un Dalil Boubakeur par exemple, plaisant à Sarkosy ou à un autre, et courant le risque de se faire rejeter par le monde musulman. Ce n’est pas son objectif. Il ne veut pas jouer au « progressiste éclairé » mais veut faire évoluer le monde musulman même si cela prend des générations. Il n’est pas intéressé par les honneurs de la République française. Il veut aller progressivement pour réussir à installer un débat inexistant jusqu'à maintenant dans le monde arabo-musulman. Quand j’entends parler du double discours, j’ai l’impression de me retrouver encore sur Le Point ou France Télévision. Il est navrant de voir qu’un BHL ou un Adler font école de cette façon. Quel double discours? Est-ce que des gens aussi sérieux et réputés que Alain Gresh, Vincent Geisser, Xavier Ternisien, les responsables de Politis.fr et j’en passe se sont tous laissés tromper par Tariq Ramadan au point qu’ils ne se rendent meme pas pas compte de son « double discours » ? Time, le magazine américain, est-il devenu il y a quelques années un magazine adepte de l’obscurantisme en désignant Tariq comme le Martin Luther King de l’islam ? Toute la propagande à laquelle on assiste aujourd’hui a été déclenchée par le réseau BHL suite à l’article de Tariq sur les nouveaux penseurs communautaristes. Nous pouvons être d’accord ou pas avec Tariq Ramadan, mais il est désolant de voir se répéter les termes « double discour », «obscurantisme », etc. comme si nous n’avions jamais entendu parler de l’Islam. Nous musulmans, ou musulmans de culture, connaissons tout de même les versets « polémiques » qui existent dans le Coran. En conséquence, nous devrions juger à sa juste valeur la difficulté rencontrée par un réformateur pour expliquer ces versets dans leur contexte à un monde musulman qui vit dans l’agonie depuis des siècles.

Jallal

Friday, April 15, 2005

Le terrorisme "marocain"

Bonjour a tous,

Bienvenue dans notre (votre) blog. Dans la section francophone, permettez-moi d’ouvrir les débats sur le problème du terrorisme en général et au Maroc en particulier. Voici un court article paru dans le numéro 167 du magasine hebdomadaire marocain Tel Quel concernant le pardon d’une mère à la société espagnole, suite aux attentas perpétrés à Madrid le 11 mars 2004.

"11 mars. Le pardon d'une mère
Je demande pardon au peuple espagnol pour ce qu’a fait mon fils". C’est ce qu’a déclaré la mère de Jamal Ahmidan, un des 7 terroristes marocains qui, cernés par la police espagnole, s’étaient suicidés collectivement peu après les attentats de Madrid du 11 mars 2004. Mme Ahmidan a aussi déclaré au quotidien madrilène El Mundo que Jamal s’était radicalisé à l’issue d’un séjour en prison au Maroc. S’agissait-il de Témara ? Et y avait-il été torturé ? La mère ne le dit pas. Quoi qu’il en soit, cela confirme que le "traitement Laânigri" des islamistes, loin de les "guérir", ne fait que les radicaliser davantage. Inquiétant, quand on pense qu’il y en a toujours plus de mille en prison…"


Ce que je veux discuter ici, est que, de part les raisons évoquées par cette pauvre mère, quelle sont les raisons et les causes du terrorisme « marocain » ? Les attentats impliquant des Marocains sont de plus en plus nombreux: Casablanca le 16 mai 2003, les attentas de Madrid, le meurtre de Van Gogh, l’implication d’une manière ou d’une autre de Marocains dans d’autres attentas, comme Al-Mossadek à Hambourg, Al-Moussaoui aux USA, etc. ; la liste devient de plus en plus longue. Bien sur qu’il doit exister des raisons communes avec celles liées au terrorisme international, ce dernier devant malheureusement un phénomène transnational, mais existe-il des facteurs spécifiques liés à la culture et au contexte politico-social marocains qui poussent un nombre de jeunes, aussi bien au Maroc qu’à l’étranger, de commettre ces actes terroristes ?

Jallal